Selon une enquête relayée par la presse internationale, plusieurs collines sont en train d’être façonnées sur l’île d’Hudayriyat, au large d’Abu Dhabi. La plus visible est celle d’Al Wathba : une ascension d’environ 1,4 km à 6 % de pente moyenne, qui devrait être prolongée avec un segment final de 500 m à 11 %. Mais le projet ne s’arrête pas là : une seconde montée — plus longue et plus dure — verrait le jour, offrant près de 4 km de montée avec une pente moyenne de 6,5 %, et un dernier kilomètre à 11 %.
Résultat : là où beaucoup envisageaient des Mondiaux 2028 faits pour les sprinteurs — profils à la vitesse explosive — le tracé pourrait profiter aux grimpeurs, modifiant profondément les équilibres de la course.

Le coup de gueule de Tim Merlier
À l’origine de la révélation de ce projet, le sprinteur belge Tim Merlier (Soudal Quick-Step) — triple vainqueur d’étapes sur le Tour de France — n’a pas caché son inquiétude. « Ils y travaillent », avait-il déclaré, suscitant l’attention des médias et provoquant une enquête.
Pour Merlier, l’éventuelle montée artificielle constitue un signal inquiétant pour l’avenir des sprinteurs : « Chaque génération de sprinteurs devrait avoir au moins une vraie chance au mondial. Je crains que ce ne soit jamais mon cas. ». Selon lui, la transformation du terrain signifierait moins d’opportunités pour les coureurs rapides : « Est-ce que tout ça est vraiment nécessaire ? » s’interroge-t-il.
Pourquoi une montagne artificielle ?
Le choix d’une montagne artificielle — plutôt qu’un parcours naturel — s’explique avant tout par la géographie d’Abu Dhabi : majoritairement plane, la région ne dispose pas de reliefs suffisants pour bâtir un tracé digne d’un championnat du monde. En concevant une montée de toutes pièces, les organisateurs s’assurent d’un circuit exigeant, spectaculaire, et possiblement plus équilibré – ou du moins différent – que les classiques plat-sprint.
De plus, en misant sur un profil plus montagneux, Abu Dhabi pourrait attirer des coureurs de premier plan spécialisés dans la difficulté — y compris des grimpeurs internationaux — augmentant l’intérêt médiatique et sportif de l’événement.
Vers un nouveau cyclisme… ou un gâchis pour certains
Ce projet ne laisse pas insensible. Pour les sprinteurs comme Merlier, c’est un coup dur : leur chance de briller en 2028 s’amenuise. Pour le cyclisme dans son ensemble, c’est un pari audacieux — moderniser le sport, surprendre les attentes, explorer de nouvelles frontières. Mais c’est aussi un symbole fort : l’idée qu’un pays puisse, à coups de terrassements et de béton, réinventer le relief pour un sport qui vit historiquement de la nature, des montagnes, des pentes — et des défis de l’organique.
Alors qu’Abu Dhabi continue de façonner ces collines artificielles, le monde du cyclisme retient son souffle. En 2028, les Mondiaux pourraient ne ressembler à rien de ce que l’on a vu jusqu’à présent. De quoi favoriser Pogacar?



